Anne Hébert. Lettre du 29 novembre 1970 (recto). |
Anne Hébert. Lettre du 29 novembre 1970 (verso). |
Je vous présente aujourd'hui une lettre manuscrite de la grande écrivaine Anne Hébert (née en 1916 à Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier, morte à Montréal en l'an 2000). Dans cette lettre, écrite à Paris le 29 novembre 1970, l'écrivaine se confie à son frère et confident Pierre Hébert. Note: pour voir la lettre en très gros plan: clic droit de votre souris pour "ouvrir l'onglet", puis clic gauche pour grossir avec la loupe. Cliquer sur votre bouton "retour" pour revenir à l'article.
Voici le contexte: en France, lors de la saison des Prix littéraires, le chef d'oeuvre de Mme Hébert, "Kamouraska" (Le Seuil) a raté par une voix le prix Théophraste-Renaudot, accordé au septième tour, par quatre voix contre trois, à "Isabelle ou l'arrière-saison" (La Table Ronde) de Jean Freustié; au Québec, on vit encore les heures noires de la Crise d'Octobre. Pour mémoire, cette grave crise politique a ébranlé le Québec et le Canada au mois d'octobre 1970. Elle débute à Montréal le 5 octobre 1970 lorsque des terroristes du Front de Libération du Québec (FLQ) enlèvent l'attaché commercial britannique James Cross. Le 10 octobre, une autre cellule du FLQ enlève Pierre Laporte, ministre du travail et de l'immigration. Le 16 octobre, répondant à une demande du gouvernement du Québec, le gouvernement canadien proclame la Loi des mesures de Guerre qui bannit le FLQ et suspend les libertés civiles. Le 17 octobre, on trouve dans un coffre de voiture le cadavre de M. Pierre Laporte, mort aux mains de ses geôliers. Au début du mois de décembre, les felquistes qui détiennent James Cross sont repérés et le libèrent en échange d'un sauf-conduit vers Cuba. Quatre semaines plus tard les felquistes qui avaient enlevé Pierre Laporte sont arrêtés puis condamnés. (Source: "The Canadian Encyclopedia, 1988, tome 3, page 1558).
C'est dans ce climat qu'Anne Hébert écrit, de Paris, le 29 novembre 1970, à son frère Pierre qui demeure à Québec. Voici la transcription intégrale de la lettre (c'est moi qui met les caractères gras et certains alinéas):
Paris, le 29 novembre 1970
Mon cher Pierre,
Je ne crois pas pouvoir aller à Québec au moment de Noël, comme je te le disais dans ma dernière lettre. "La saison des prix" m'a pas mal fatiguée et puis la tension politique que je devine au Canada m'effraye un peu, et puis tout ce froid de l'hiver en perspective... Je crois qu'il serait préférable que j'y aille au printemps. À ce moment-là il sera plus facile d'aller à Ste-Catherine. J'ai hâte de voir tes dernières transformations et de connaître enfin Dupont et Dupond. Si tu es toujours d'accord nous pourrions alors choisir ensemble des nouveaux rideaux.
J'espère que tu te portes toujours bien et que ton retour à chasse et pêcheries s'est bien passé? Y a-t-il de la neige à Québec? Continues-tu toujours d'aller à Ste-Catherine?
Ici la température est toujours très belle, chaude et ensoleillée. Un mois de novembre extraordinaire. Lorsque je me promène dans le quartier, St-Germain, St-Michel, St-Séverin, la Huchette, les quais, surtout rue Git-le-Coeur je voudrais tant que tu sois là. Nous pourrions aller dîner au petit Maxime. La serveuse me demande toujours de tes nouvelles.
Écris-moi bien vite. Je t'embrasse. Anne
Je joins à cet article, pour le compléter, deux photos qui montrent l'enveloppe de la lettre:
Je vous souhaite, cher lecteur, une belle journée.
2 commentaires:
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